L’histoire de la céramique vietnamienne
Bien qu’elle date de plusieurs millénaires aussi vieille que la civilisation vietnamienne elle-même, c’est essentiellement sous la dynastie des Lê, à partir du XVème siècle, que la céramique vietnamienne marque le plus profondément son originalité. Un savoir-faire perpétué depuis des milliers d’années déjà combiné avec l’extraordinaire créativité du potier vietnamien vont faire naître au fil des siècles une excellence reconnue dans le monde entier.
Jadis la céramique vietnamienne s’inscrivit dans un rôle d’acteur essentiel du commerce international. D’ailleurs, une céramique vietnamienne datant du XIVème a récemment été trouvée au Japon dans l’ancien port commercial très actif de Sakai. Le style de création très libre de l’époque voulait se démarquer des produits des paysans voisins, notamment de la Chine, et d’affirmer son identité : formes et émaux plus variés, dessins de plus en plus sophistiqués, fréquence du motif bouddhique du lotus, apparition du céladon et plus grandes variétés des pigments.
À cette époque sont nés des articles à motifs bleus recouverts d’émail blanc adoptant quatre sortes de motifs décoratifs : paysages, personnages, fleurs et oiseaux, herbes et insectes tracés dans un mouvement calligraphique, enlevé et harmonieux.
Conquérant, le Vietnam s’engagea dans une politique d’expansion aux dépens de leurs voisins du Sud. C’est ainsi que la production de poterie et céramique reçurent l’apport culturel du royaume du Champa grignoté au gré des siècles puis finalement absorbé en 1822 par l’empereur Minh Mang. Il en résulta l’apport de nouveaux motifs de décoration avec pour certains l’empreinte de la civilisation indianisée.
L’arrivée des Français à la fin du XIXème siècle fut également une source de changements avec l’intégration de certaines méthodes occidentales, ainsi que certains thèmes de décoration plus ouverts. Le centre de production de céramique à Bien Hoa, situé aujourd’hui dans la banlieue de Saigon, avait très vite intégré au début du XXème siècle les nouvelles techniques occidentales ce qui lui permit d’évoluer et de renouveler ses modèles. La céramique, dans l’excellence de son art, était enseignée aux écoles des Beaux-Arts de Saigon et de Hanoi.
Où trouver de la céramique au vietnam ?
Forte de ses valeurs culturelles et historiques, la céramique reste un artisanat florissant malgré l’arrivée massive d’objets en plastique dans la vie quotidienne. De nombreux villages à travers le pays perpétuent cet artisanat traditionnel séculaire. Le plus connu de tous est Bat Trang, à seulement quelques kilomètres de Hanoi.
Bat Trang
Situé sur les rives du fleuve Rouge, Bat Trang est le berceau de la céramique au Vietnam et possède le plus grand nombre de fours au niveau national avec plus de 600 fours toujours en fonctionnement.
Le village de Chu Dau
Toujours dans le delta du fleuve Rouge, citons également le village de Chu Dau. Quintessence de la céramique vietnamienne entre les XIVème et XVIIème siècles, la céramique de Chu Dau était l’une des plus prisées du pays. Depuis près d’une vingtaine d’années, la restauration des techniques anciennes comme l’utilisation de matières naturelles a permis de ressusciter l’ancien village de céramique de Chu Dau. Ce savoir-faire ancestral reconnu est d’ailleurs actuellement exposé dans 45 musées dans une trentaine de pays.
Le village de Thanh Hà
Dans le Centre du Vietnam, à côté de Hoi An, le village de Thanh Hà tient sa fierté artisanale de ses produits délicats entièrement faits à la main. Leurs céramiques étant non émaillées, les artisans obtiennent des couleurs jaune, rouge, rouge brique, brun, rose, noir… selon la matière première utilisée et la température de cuisson.
Le village de Bau Truc
Enfin, citons le village de Bau Truc situé dans le Centre du Vietnam également mais plus au Sud de Hoi An, dans la province de Ninh Thuan, ancien territoire du Royaume du Champa. Ce village perpétue encore le métier de la céramique et de la poterie des Chams entièrement modelés à la main ornés de bas-reliefs aux motifs très fins et plein de féminité, et aux couleurs spécifiques, obtenues grâce à l’ancestrale connaissance des Cham sur les plantes. L’autre particularité du village est que, l’ethnie Cham étant une société matriarcale, ce sont les femmes les potiers et qui donnent forme à leurs produits atypiques symbolisant la parfaite harmonie entre les différents éléments : la terre, l’eau, le feu.
La céramique vietnamienne aujourd’hui
Pour commémorer en 2010 le millénaire de la capitale du Vietnam, Hanoi, la digue qui fut jadis construite pour protéger la ville des crues du fleuve Rouge est devenue le support de la plus grande mosaïque de tesselles de céramique du monde. Couvrant quatre kilomètres de long, cette œuvre présente en plusieurs tableaux l’histoire et le patrimoine du Vietnam. Un travail minutieux qui nécessita la participation d’une vingtaine de peintres vietnamiens, plus d’une centaine d’artisans en céramique et le concours d’artistes étrangers et d’ambassades dont celle de la France.
Admirer la céramique vietnamienne en France
Si vous êtes de passage à Paris, allez donc au musée national des Arts asiatiques-Guimet. L’archéologue Henri Maspero, ancien pensionnaire de l’Ecole Française d’Extrême Orient avait fait un don de 1630 objets en céramique vietnamienne qu’il avait rassemblé lors de son séjour en Indochine de 1908 à 1919. La collection présente des exemplaires significatifs de chaque type de production des époques Ly et Trân.